L'Amérique de Kafka

" Si l’Art doit épouser une forme de vérité et d’honnêteté, alors la peinture est une conversation, un combat plus ou moins déguisé. À travers le processus de création, il n’existe aucune voie autre que celle appelant à une posture humble et intègre face à soi-même et l’oeuvre en cours de réalisation. 

Demeurer loyal est essentiel. L’acte de création dépasse le peintre. La peinture elle-même est régie par des vérités que l’on ne peut appréhender pleinement. Il doit aussi exister un quelque chose venu d’en-haut qui dicte ses propres besoin. Format et medium importent peu. Ils varient en fonction de l’intention, car chaque sentiment requiert une expression singulière. Comme un nombre infini de sens peut accompagner une même couleur, un personnage prend place à différents niveaux et une peinture peut révéler de nombreuses dimensions. 

Il n’y a pas de bonnes ou mauvaises interprétations de mon travail. Ne pas comprendre est acceptable. Personne ne doit comprendre. Le « pourquoi » n’a qu’une valeur relative. L’Art devrait être un moment hors du temps. Quand le tout s’immobilise. La fonction du peintre est de rappeler au public le caractère par essence insaisissable de l’Art. 
Je ne cherche pas à définir quoi que ce soit. Je n’attends aucune réaction spécifique. Mon but est l’intimité, le sujet et le langage. Le mouvement est la clé. 

L’humain est enclin à la recherche du contentement. Le succès, la richesse, la satisfaction de l’égo, la souffrance, l’addiction, la rassurante superficialité sont des outils à un équilibre instable. 

Je cherche par l’abandon d’un figuratif pur à tisser les liens entre la plastique et la profondeur des fissures du caractère afin de présenter les personnages au plus près de ce qu’ils me semblent être. L’ajout d’éléments de nature surréaliste peut avoir vocation d’une mise en avant de ce non-sens moral comme l’inscription du sujet dans un cadre abstrait peut servir à souligner la dérive d’une âme en quête de réponses. 

En cherchant à me détacher de la véracité des lignes et des traits physiques, par un jeu de proportions incorrectes et de couleurs inexactes, ma démarche est de transpercer la surface visible pour plonger au plus profond d’une vérité intime, qui ne serait que la mienne mais est bien là, et de réussir ensuite à sublimer une bassesse qui hante et effraie." Mathieu Bernard Martin